Diffusion des courants rubané et cardial.

L’agriculture et l’élevage qui caractérisent le mode de vie néolithique sont apparus indépendamment dans plusieurs endroits du monde et à des époques différentes (Amérique centrale, Sahel africain, Asie du Sud-Est, vallée du Nil et Proche-Orient), toujours dans des régions qui associaient un climat chaud et ensoleillé (mais avec de l’eau en abondance) et la présence de plantes et d’animaux faciles à domestiquer.

Au Proche-Orient, ce mode de vie s'installe très progressivement à partir du VIIIe millénaire av. J.-C. , à la faveur des conditions particulièrement favorables du "croissant fertile" :

  • Un climat très vite devenu chaud après la période glaciaire,
  • Les plaines alluviales des grands fleuves de Mésopotamie,
  • La présence de plantes à graines très nutritives faciles à récolter (blé et orge sauvage, légumineuses),
  • L’existence de mouflons et chèvres sauvages, spécifiques à cette région en plus du boeuf sauvage (aurochs) et du sanglier à la répartition beaucoup plus large.

A partir de cette zone nucléaire, le Néolithique diffuse rapidement, notamment vers l'ouest (Turquie puis Balkans). De là, il gagne l'Europe par deux axes privilégiés :

  • Les plaines limoneuses d'Europe centrale (courant "danubien" à poteries "rubanées") ;
  • Les côtes de la Méditerranée (courant à poteries dites "cardiales").

Dans la seconde moitié du VIe millénaire av. J.-C., ces deux grands courants du Néolithique européen atteignent l’Alsace pour les "rubanés", le littoral de Provence et du Languedoc pour les "cardiaux". Leur diffusion sur le territoire de la France actuelle s'accompagne de contacts et d'influences croisées. L'un et l'autre courant sont attestés sur la basse-Loire ainsi que dans l'est et le sud de la Bretagne dès le début du Ve millénaire av. J.-C. Globalement, ces premiers paysans semblent n'avoir porté que peu d'intérêt à la chasse, surtout ceux relevant de la tradition "rubanée" (dans les sites du Bassin parisien où les déchets domestiques ont pu être étudiés, le gibier représente souvent moins de 20% des restes d'animaux).

A la périphérie de la zone déjà "néolithisée", les chasseurs mésolithiques entrent en contact avec les nouveaux venus ; certains adoptent la céramique, d'autres obtiennent des animaux domestiques (mais on ne sait si c'est par troc ou par razzia). A l'inverse, les Néolithiques obtiennent des parures en coquillages récoltés en dehors de leur aire culturelle. Actuellement, certains chercheurs pensent que ces phénomènes de marge et d’acculturation ont pu jouer un rôle important dans la naissance du mégalithisme.

Les techniques agricoles néolithiques, encore rudimentaires, sont cependant bien établies :

  • Le défrichage se fait largement par brûlis (sans doute après récupération du bois d'oeuvre utilisable) ;
  • La régénération des sols implique des jachères prolongées suivies d'essartages et d'écobuages ;
  • L’usage d'araires est probable, au moins dans certaines régions et pour certains gros travaux ;
  • Les médiocres possibilités de stockage du fourrage amenaient à ne garder que quelques reproducteurs durant l'hiver (ce qui a pu contribuer à accélérer la "dérive génétique" par rapport aux souches sauvages).

La relative stabilité des habitats en même temps que les nécessaires regroupements périodiques pour des travaux en commun ont contribué à forger des structures sociales élaborées et à faciliter l'émergence de "leaders" ainsi que de détenteurs de savoir-faire spécialisés. Une vie communautaire poussée liée à la reconnaissance d'individus (ou de lignages) privilégiés va retentir sur les comportements funéraires, sur la perception du sacré et sur la définition des identités collectives.

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Quelques indices des contacts noués  par les premiers paysans d'Europe occidentale.

Soc d'araire en dolérite, néolithique moyen Saint-Joachim (Loire-atlantique).