Le recours à la "terre"

Il a pu être un palliatif au manque de pierre (Dissignac), mais il semble avoir été un parti délibéré dans la plupart des grands tumulus carnacéens avec le choix très précis d'un limon "hydromorphe compact" pour constituer la masse du monument.

L'exemple d'Er-Grah à Locmariaquer montre que le limon a été prélevé, transporté et entassé par mottes. Celles-ci ont été récoltées dans une zone humide (des lits de mousse sont pris dans l'empilement) et au voisinage d'un habitat (débris de poteries et de silex sont dispersés dans le sédiment). Des zones propices abondent à 1 ou 2 km du site mais il ne semble pas y en avoir eu de plus proches.

 

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Le monument de Dissignac (Loire-atlantique) montre une structure : les espaces entre les parements sont occupés par de la terre amoncelée.

Dans le noyau du tumulus d'Er-Grah, des traînées noirâtres correspondent à la végétation qui garnissait encore les mottes de limon lorsqu'elles ont été entassées.

Les moellons

Ils reflètent le plus souvent la géologie locale. Leurs surfaces sont souvent corrodées et les arêtes émoussées, montrant qu'il s'agit de pierres roulantes récoltées en surface ou sur les estrans.

Lorsque les pierres sont anguleuses, témoignant d'une extraction, elles restent altérées "à coeur", ce qui indique une origine malgré tout superficielle.

Les "carrières" mises au jour autour de monuments (par exemple à Locmariaquer) ne sont effectivement que de petites excavations superficielles ayant profité au maximum du réseau naturel des diaclases (cependant, l'étude d'une fabrique de haches polies comme celle de Plussulien a montré que les Néolithiques étaient capables d'attaquer un affleurement en pleine roche).

La plupart des maçonneries néolithiques sont en pierre sèche (même pour celles qui sont associées au noyau limoneux d'Er-Grah à Locmariaquer, alors que ce matériau aurait pu faire un très bon liant).

En général, il ne s'agit pas de murs véritables mais de simples parements dont la stabilité est assurée à la fois par un fruit plus ou moins important et par de petites pierres intermédiaires disposées comme cales.

Dès le début de la construction mégalithique armoricaine, certaines couvertures ont été assurées par voûtes en encorbellement qui représentaient un remarquable savoir-faire empirique.

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Une des tombes à couloir de l'île Guennoc (Finistère). La paroi maçonnée de la chambre s'est conservée sur près de 2m de haut.

Un exemple de pic néolithique façonné dans un bois de cerf. Cet outil permettait de désarticuler une roche déjà fissurée.

Les grands monolithes

Ce sont eux qui légitimement suscitent le plus de questions. Le plus souvent, la roche apparaît comme locale, mais un certain nombre de cas indiscutables témoignent de transports sur des distances pouvant atteindre la dizaine de kilomètres.

Dans le Morbihan, les exemples les plus remarquables se trouvent dans la presqu'île de Locmariaquer ; ils concernent notamment une douzaine de blocs d'orthogneiss dont le Grand-Menhir de quelque 270 tonnes et la dalle de chevet de la Table-des-Marchands en grès ladère éocène. Ces matériaux semblent avoir parcouru une dizaine de kilomètres depuis leurs gisements potentiels respectifs.

La plupart des monolithes utilisés présentent l'aspect de blocs naturellement dégagés par l'érosion. Tout au plus, une des faces, plus anguleuse, marque-t-elle le plan de diaclase qui a permis de le séparer du rocher sous-jacent, sans doute en forçant avec des coins de bois et des leviers. Ces caractéristiques sont particulièrement nettes sur les menhirs des alignements de Carnac.

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Le Grand-Menhir de Locmariaquer, gigantesque bloc d'orthogneiss de 20 m de long et 270 tonnes a sans doute été transporté sur une dizaine de kilomètres.

Esquisse géologique du Golfe du Morbihan et de ses abords montrant les possibilités d'approvisionnement en blocs de grès et orthogneiss de la zone mégalithique de Locmariaquer.