Un travail long et difficile

Grâce à la patiente et laborieuse collaboration entre des restaurateurs français, missionnés très régulièrement sur place par le musée du Louvre, et les équipes irakiennes du musée culturel de Mossoul, certaines des œuvres détruites lors de l’occupation par Daesh reprennent forme peu à peu, laissant l’espoir d’une victoire symbolique contre la volonté de détruire ces vestiges miraculeusement conservés jusqu’à nous depuis des périodes ancestrales, remontant pour beaucoup à près de 3000 ans, puisque c’est dans le hall assyrien que l’essentiel des œuvres dévastées a été retrouvé. Ayant subi piquetage, explosions, incendies – sans parler de pillage pour d’autres –, ces œuvres resteront à jamais marquées par les attaques subies.

Ce travail passe d’abord par le tri et l’état des lieux de chacun des fragments et une étude minutieuse des plans de cassure, prélude à une recherche globale pour envisager des plans de remontage pour ces ensembles d’œuvres aujourd’hui détruites. Chacun des fragments, des plus monumentaux aux plus minuscules, doit être consolidé, renforcé au besoin, nettoyé et préparé pour un remontage d’ensemble dont le plan lui-même requiert une évaluation méticuleuse pour déterminer la meilleure marche à suivre.

Toutes ces opérations requièrent une expertise et un savoir-faire d’autant plus essentiels que les collections retrouvées au musée culturel de Mossoul concentrent à peu près tous les désordres possibles et cumulent à ce titre fragilités et complexités. Outre la qualité et le nombre des restaurateurs nécessaires pour affronter une situation aussi terriblement dévastée, il faut du matériel de restauration et des espaces de travail aménagés au mieux au sein du musée pour réduire les déplacements de vestiges déjà très sensibles. Il faut également des outils de stockage et de manipulation, en particulier pour les fragments monumentaux.

La restauration, qu'est-ce que c'est ?

La restauration d'art désigne l'ensemble des traitements et interventions réalisés sur une œuvre afin de rétablir un état historique donné. Elle permet aussi d’améliorer la lisibilité (écriture, dessins, gravure, etc.) et l'esthétique d'une œuvre. Depuis la seconde moitié du XXe siècle, les membres du Conseil international des musées (ICOM) et du Conseil international des monuments et des sites (ICOMOS) privilégient le terme de « conservation-restauration » pour désigner la discipline dévolue à l'examen matériel des biens culturels.

Le restaurateur est la personne qui possède la formation, le savoir et l’expérience nécessaires pour entreprendre des activités de conservation-restauration. Les restaurateurs sont habituellement désignés selon leur domaine de spécialisation : pierre, métal, bois, etc.

La base de trône d’Assurnasirpal II et le début du programme de restauration

Cette large estrade en pierre provient de la salle du trône du palais Nord-Ouest bâti par le roi assyrien Assurnasirpal II au IXe siècle av. J.-C. Elle a été découverte sur le site de Nimrud (ancienne Kalhu) par l'archéologue britannique Austen Henry Layard. Laissée sur place, elle fut redécouverte un siècle plus tard, lors des fouilles anglaises de Max Mallowan. Cette base porte un long texte au nom d’Assurnasirpal II, inscrit en caractères cunéiformes et langue assyrienne.

Lors de l’occupation du musée par Daesh, cette base de trône située au milieu du hall assyrien est volontairement détruite à l’explosif. Le choc a détruit ce monument, réduit en une multitude de fragments épars, tout en laissant un spectaculaire trou béant dans le sol du musée.

La base de trône figure parmi les œuvres sélectionnées pour démarrer en priorité le programme de restauration des collections du musée. Après un tri et une étude minutieux, les fragments ont été soigneusement rangés, nettoyés et consolidés avant de procéder aux différentes opérations nécessaires au remontage de l’ensemble. Après quelques fructueuses missions de restaurations, elle reprend forme grâce au travail conjoint des équipes irakiennes et françaises.

Très vite, ont été lancées en parallèle les opérations nécessaires à la restauration de plusieurs autres œuvres majeures et martyres du musée de Mossoul dont le lion monumental et la célèbre stèle du banquet provenant également de Nimrud.