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Même si les objets retrouvés lors des fouilles peuvent nous éclairer sur les occupants magdaléniens de Font-de-Gaume, ils ne permettent pas de dater formellement les peintures préhistoriques. La prudence est donc de mise !
Rester prudent
D’une manière générale, il est très difficile d’établir une relation claire entre le décor pariétal et le contexte archéologique d’une grotte ornée, plus encore dans le cadre de travaux anciens ; le plus souvent, l’objet est la preuve de la fréquentation d’un lieu, pas de sa décoration. De plus, en période froide, la sédimentation assurant la contextualisation des objets est faible, voire nulle en milieu souterrain, à la différence de celle des abris sous roche, soumis à l’alternance gel/dégel favorisant l’accumulation de sédiments et la conservation des vestiges. Il en résulte que les apports anthropiques, correspondant peut-être à des millénaires de fréquentation, peuvent reposer sur un même niveau.
Une grotte ornée enfin n’est pas forcément un habitat, surtout si elle est profonde : les hommes y ont laissé les traces de leur expression symbolique, mais pas d’activités techniques domestiques sinon en rapport étroit avec le décor : c’est un peu comme si, fouillant une église abandonnée depuis plusieurs siècles, on y recherchait les vestiges de la vie quotidienne. Le matériel est souvent limité, et si les colorants découverts au pied des peintures ont peut-être contribué à leur exécution, il faut apporter la preuve de leur stricte contemporanéité pour en être sûr.
L’attribution chronologique des objets de Font-de-Gaume montre un rapport très lâche avec les datations directes des œuvres – inexistante à Font-de-Gaume – et les comparaisons stylistiques avec des pièces objectivement mieux datées. Les objets recueillis dans la grotte ne constituent bien souvent que des indices de passage avant, pendant et après son ornementation.
Premières fréquentations
Les premiers occupants de la grotte sont les ours des cavernes : leurs traces (griffades sur parois) et leurs ossements ont été trouvés en grande quantité dans certains secteurs périphériques de la cavité, mêlés à un remplissage argileux par endroit épais de plus d’un mètre. Des humains - soit les derniers néandertaliens, soit les premiers hommes anatomiquement modernes, la question est toujours discutée - les ont quelquefois accompagnés, laissant des outils caractéristiques de cette époque (pointes à dos courbe et couteaux en silex de l’époque de Châtelperron). Quelques ossements portent des traces de découpe au silex : les hommes ont pu récupérer des peaux, des carcasses et quelquefois des canines destinées à la parure.
Le matériel laissé par les hommes modernes
Comme l’avaient remarqué Louis Capitan, l’abbé Breuil et Denis Peyrony, les niveaux d’occupation se concentrent, voire se télescopent, en une mince stratigraphie (de 0 à 5 cm !), un mince feuilleté de petits litages noirâtres séparés par un liseré argileux, avec poteries coiffant l’ensemble (dans la zone décorée, de l’entrée au carrefour et dans la galerie latérale). Deux petits foyers, l’un en fond de galerie, l’autre au pied du Rubicon, n’ont jamais été datés.
Attribuable au Paléolithique supérieur sans précision, un outillage lithique sur lames et éclats semble plus typique. Quelques grattoirs et pièces retouchées sur lame pourraient appartenir à l’Aurignacien sans que cette période soit réellement attestée par son industrie osseuse caractéristique. Indubitable en revanche, une pointe à face plane et deux fragments de pièce foliacée solutréenne, vers - 20 000 ans, l’époque de Lascaux.
Le matériel raisonnablement attribuable au Magdalénien, plus ou moins contemporain des peintures, semble cohérent mais insuffisant en l’absence d’une industrie osseuse caractéristique à l’exception d’une aiguille fragmentaire. Il provient surtout du secteur le mieux conservé, au pied des peintures, au-delà du Rubicon. On remarquera la quasi absence de lampes, y compris de fortune : l’éclairage de la grotte aura sans doute été plutôt fourni par des torches. Des fragments de colorant, peu démonstratifs, et des outils lithiques (burins, etc., plus ou moins émoussés) ont probablement servi au décor sans que la preuve formelle en ait été apportée. Sortant du lot, une esquille osseuse gravée d’une tête de cheval garantit bien la présence magdalénienne.
Grattoir sur lame aurignacienne, fouilles de François Prat. Les Eyzies-de-Tayac, musée national de la Préhistoire. (© Ph. Jugie – MCC/MNP.)
Fragment de pièce à retouche solutréenne. Les Eyzies-de-Tayac, musée national de la Préhistoire. (© Ph. Jugie – MCC/MNP.)
La présence postglaciaire (du Néolithique à l'époque moderne)
Il est regrettable que le matériel datant de la Préhistoire récente à l’époque moderne ait été traditionnellement négligé dans la région. Font-de-Gaume n’échappe pas à la règle. Des tessons de céramiques de tous âges, tournés ou non, parsemaient les différents secteurs de la cavité, ainsi que divers ossements fragmentaires de faune postglaciaire. Quelques restes humains (fragments crâniens et os longs) sont vraisemblablement attribuables à l’âge du bronze, période bien attestée dans la grotte par la découverte d’une armature de flèche en os à pédoncule et à ailerons, et d’une belle épingle de bronze.