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Le sel dans les sociétés anciennes
À partir du Néolithique, le sel devient une ressource indispensable qu’il devient vital d’acquérir. Les chasseurs-cueilleurs n’ont pas besoin en effet d’exploiter spécialement le sel, qu’ils trouvent principalement dans la viande du gibier. En revanche, les populations d’éleveurs et d’agriculteurs sédentarisés doivent obtenir un approvisionnement régulier en sel, car:
- Il leur faut compenser les régimes alimentaires pauvres en sel induits par le développement de l’agriculture (comme ceux à bases de céréales et de légumineuses).
- Mais surtout, il leur faut assurer l’entretien du bétail, en l’alimentant artificiellement en sel.
- Enfin, il leur faut assurer la période dite de « soudure » située entre l’automne et le printemps, en conservant des stocks de nourriture : c’est le rôle des salaisons et des saumures.
Qui sont les grands consommateurs de sel ?
Pour une exploitation agricole de la taille d’une petite ferme, comme on en connaît de nombreux exemplaires à l’âge du Fer, on obtient des consommations minimales de sel relativement élevées, qui sont l’ordre d’au moins 120 kilos par an, dont près des trois-quarts sont absorbés par l’alimentation des animaux d’élevage.
La consommation importante de viande de porc à l’âge du Fer implique l’existence de moyens de conservation à long terme fondés sur le sel (pour les charcuteries). Au Haut Empire romain, la renommée des jambons de l’Est de la Gaule, qui sont appréciés jusqu’à Rome, souligne l’usage intensif du sel dans la production alimentaire des régions romanisées.
Il est enfin un type d’organisation qui rassemble un très grand nombre d’hommes, qu’il faut nourrir et alimenter pendant ses déplacements en masse au loin. Ce sont les armées, qui jouent un rôle fondamental dès la fin de l’époque gauloise. En effet, l’armée a besoin de sel de cuisine en très grandes quantités à la fois. L’armée est également une grande utilisatrice de conserves alimentaires, comme en particulier les salaisons, grâce auxquelles il est possible d’emporter sur des théâtres d’opération éloignés des ressources alimentaires de base.
Les enjeux du sel
Le développement de l’État – avec son corollaire : l’essor des armées – accompagne donc l’essor de l’industrie d’extraction du sel. La formation de pouvoirs centralisés contribue en effet à l’intensification de la production de cette matière première véritablement vitale, comme au développement de ses réseaux de diffusion à longue distance.
Dans ces conditions, où de larges bassins de population dépendent de ce produit rare hors des régions côtières, la production du sel devient particulièrement rentable. Elle est d’autant plus lucrative que son extraction et sa diffusion sont contrôlées par des donneurs d’ordre peu nombreux, mais puissants. Car les retours assurés par l’exploitation du sel permettent d’investir dans la construction d’infrastructures (comme des fortifications), la production d’armement ou encore le recrutement de mercenaires.
Le contrôle de la production du sel assure donc le pouvoir. C’est pourquoi les centres de production du sel de l’intérieur des terres sont convoités et disputés, dès lors que des pouvoirs relativement centralisés se mettent en place. Le sel devient alors un enjeu stratégique.
Les retours qu’il permet de dégager en font également un élément fondamental de l’économie de ces premiers États, dont ils ne peuvent désormais se passer. La pression exercée sur la production peut conduire alors à la surexploitation de cette ressource, occasionnant des phénomènes de dégradation irréversible de l’environnement.