Plan © D. Busson et V. Charlanne.

Cliché © IGN Photothèque Nationale - 1999.

La découverte du module

Les découvertes de rues antiques, la restitution des limites des principaux monuments du Haut-Empire et le tracé de certaines rues médiévales ont permis de mettre en évidence une grille théorique, strictement orthogonale, dont le module a été retrouvé dans toute la partie centrale de Lutèce.

Ce module correspond exactement à 300 pieds romains (soit 88,8 m), avec ponctuellement des subdivisions d’un demi-module de 150 pieds. Le choix de cette mesure, empirique, prouve qu’il s’agit d’une démarche abstraite et que les concepteurs de ce projet n’ont pas eu à tenir compte, ou alors ne voulaient pas le faire, d’éventuelles occupations antérieures. Il semble que ce système de modules ait également été utilisé sur la rive droite, du moins partiellement, même sur des terrains qui ne furent pas complètement urbanisés : ainsi, l’écart que l’on trouve entre le cardo maximus (rue Saint-Martin) et le cardo de la rue Saint-Denis correspond précisément à 600 pieds.

L’implantation du quadrillage

Pour implanter ce quadrillage, les arpenteurs et les géomètres ont probablement pratiqué un jalonnement sur la ligne droite qui deviendra l’axe principal de la fondation, le cardo maximus. On peut supposer que la première station où a été installée la groma devait correspondre au point le plus haut de cet axe, offrant ainsi une vision très dégagée vers l’île et la rive droite. Ce « point zéro » se situerait probablement à l’angle sud-est du forum, aujourd’hui devant les n°172 et 174 de la rue Saint-Jacques, à l’endroit le plus élevé de la montagne Sainte-Geneviève.

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Plan © D. Busson et V. Charlanne. 

Cliché © IGN Photothèque Nationale - 1999.

Plan © D. Busson et V. Charlanne. 

Cliché © IGN Photothèque Nationale - 1999.

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Cliché © IGN Photothèque Nationale - 1999.

Les voies principales

Parmi les grandes artères de Lutèce, certaines existent encore. Il s’agit essentiellement de voies cardinales comme le cardo maximus de la rue Saint-Jacques, le cardo du boulevard Saint-Michel et le cardo de la rue Valette. Sur la rive droite, on retrouve le cardo maximus de la rue Saint-Martin et un autre cardo rue Saint-Denis.
Les voies décumanes ont été presque totalement effacées de la topographie parisienne actuelle. Certaines ne reprenaient pas exactement les lignes de la grille fondatrice, ce qui montre que les urbanistes antiques adaptaient de façon empirique le schéma de la ville. Ainsi le decumanus dit de l’Ecole des Mines est légèrement décalé au sud d’une petite dizaine de mètres. Vers le nord, le decumanus supposé longer les thermes de Cluny parallèlement au boulevard Saint-Germain n’est pas séparé du decumanus de la rue des Ecoles selon le module de 300 pieds mais en est distant de 400.

Les adaptations au schéma orthonormé

Il existe aussi des rues en biais par rapport au quadrillage mais qui participent néanmoins du schéma urbain. Ainsi, l’axe formé par la rue de la Sorbonne et la rue Victor-Cousin limite, à l’est, les thermes de Cluny dont un côté fait juste 300 pieds, et aboutit, au sud, à l’entrée du forum. Or cette dernière est décentrée par rapport au grand côté du monument : la rue a été adaptée en conséquence.
Une via transversa partant du point zéro de la ville pour rejoindre la voie de Melun présente un cas similaire : son tracé correspond à la diagonale parfaite d’un rectangle de deux modules et demi sur trois. Cette route, sans doute très importante car elle reliait en fait la capitale des Parisii à l‘Italie en passant par Melun et Lyon, avait donc été prévue dès la construction de la ville antique.

Plan © D. Busson et V. Charlanne. 

Cliché © IGN Photothèque Nationale - 1999.

Les orientations secondaires

En périphérie de la ville, on trouve des orientations secondaires correspondant sans doute à des routes qui menaient à Lutèce et qui bénéficiaient ainsi de l’accès au pont. Il est difficile de savoir si, comme la route de Melun, elles avaient été intégrées au sein même du schéma urbain d’origine. Ainsi, il est probable qu’une partie de la rue de Vaugirard était une voie antique. Peut-être était-elle une limite de la ville à laquelle aboutissaient plusieurs decumani.
Une autre voie divergente importante est observable sur le cardo de la rue Saint-Jacques sous la forme d’une déviation de cet axe avant que la rue ne reprenne presque son orientation initiale. Plusieurs voies et habitats repérés à proximité se sont manifestement calés sur cette orientation divergente, sans doute parce qu’elle constitue un raccord entre le nouvel axe de franchissement qui détermine la fondation de la ville et une route plus ancienne, vraisemblablement protohistorique, qui reliait le site lutétien à I’oppidum gaulois de Genabum (Orléans).

En fait, on remarquera que cette déviation se produit juste en bordure des limites reconnues de la ville (c’est à partir de ce point que cette voie devient une route). Il est cependant possible qu’il s’agisse d’une adaptation à une particularité du relief. C’est d’ailleurs ce type d’explication qui permet le mieux de rendre compte d’autres divergences d’orientation. C’est le cas pour l’Ile de la Cité et le petit quartier du monceau Saint-Séverin. Il était en effet difficile de les intégrer au quadrillage parce que leur surface réduite et leur situation en zone inondable ne permettaient pas une implantation très systématique. On peut tout au plus estimer que le cardo maximus devait y desservir une série de petites rues perpendiculaires menant aux habitations.