Du Moyen-Âge islamique, peu de constructions civiles sont conservées en dehors de la citadelle. Cette constatation donne à elle seule de l’importance au hammam mamelouk qu’a fait construire l’émir Manjak en 773/1372. Par son architecture et son décor, il est l’un des bâtiments les plus coûteux de la Bosra islamique. Il atteste que la Bosra du 8e/XIVe siècle est encore assez attractive pour susciter des projets des cercles les plus élevés de l’empire mamelouk. Ces programmes servaient aussi bien aux habitants de la ville qu’aux pèlerins en route vers les villes saintes du Hijâz.

Plan et construction

Le bâtiment est placé le long de la rue nord-sud, en face de la Grande mosquée. Le complexe étroit, allongé, s’articule en plusieurs parties selon la suite fonctionnelle des opérations du bain. À la pièce d’accueil au sud s’articulent vers le nord plusieurs salles de bains et, derrière elles, les installations techniques avec des réservoirs d’eau, le chauffage et d’autres pièces. L’organisation du plan et de l’élévation, les techniques de construction et les détails stylistiques rapprochent le hamman Manjak des bains mamelouks de Damas. De ce point de vue aussi la place de ces bains dans la série des constructions islamiques de Bosra est remarquable. Le maître d’œuvre de la construction était l’officier (émir) mamelouk Manjak al-Yûsufî, qui était monté des rangs de l’armée à des fonctions honorables à la cour et jusqu’à remplir des emplois de direction dans l’empire mamelouk. La ruine du bain à l’époque ottomane et avant tout la croissance de la population de Bosra ont eu pour conséquence que les linteaux de porte et de fenêtre, sur lesquels étaient inscrites les armoiries et les inscriptions, ont été enlevés des façades et intégrés dans une maison privée. Le bain lui-même a été transformé en maison d’habitation avec une cour servant aux activités domestiques. Les murs qui cédaient ont été étayés extérieurement par de la maçonnerie de telle façon que les façades originelles du côté de la Grande mosquée n’étaient plus visibles qu’en partie. L’intérieur détruit du bain a été nivelé à environ deux mètres au-dessus du sol originel ; par-dessus ont été construits de nouveaux murs de séparation et des rajouts internes.

Des recherches de la Direction générale des Antiquités ont révélé qu’une partie substantielle de la construction originelle était encore conservée sous ces adjonctions. La façade ouest et des parties de la pièce d’accueil ont fait l’objet de consolidations. De 1981 à 1993, la Direction des Antiquités de Bosra et l’Institut archéologique allemand ont assuré en commun le dégagement, la fouille et la restauration partielle du hammam. Ces travaux ont donné accès à un monument islamique impressionnant et ont rendu visible son mode de fonctionnement originel.