Le destin historique de Bosra aux époques musulmanes fut étroitement lié à la capitale syrienne Damas. Le Hauran fut incorporé dans le territoire musulman en expansion en 13/634, à peu près au même moment que la ville de Damas.

Conquête et période omeyyade

On peut supposer qu’à Bosra le processus d’islamisation s’installa de façon graduelle et que la taille et l’apparence de la ville ne furent pas profondément modifiées. Bien que deux fragments d’inscriptions dédicatoires, datées de 102/720-721 et 128/745-746, aient été découvertes dans la Grande mosquée de la ville, que l’on appelle traditionnellement mosquée d’Omar, elles ne peuvent évidemment pas être connectées avec la structure conservée, mais peut-être avec une adaptation plus ancienne d’un édifice païen ou chrétien. De nouveaux modèles architecturaux sont mis en évidence, à la fois à la mosquée d’Omar, inspirée de la vénérable mosquée des Omeyyades de Damas, et à la madrasa (école coranique) de la mosquée al-Mabrak, un des plus anciens bâtiments de ce type à avoir survécu dans l’ensemble du monde musulman et qui suit un schéma architectural iranien. 

Les Seldjoukides et les Ayyoubides

En 542/1147, pendant la période seldjoukide, qui fut assombrie par la seconde croisade, seules quelques constructions mineures furent ajoutées à la ville ; cependant, la citadelle fut renforcée par une tour supplémentaire en 542/1147-1148. Bien que confirmé comme gouverneur de Bosra par le chef victorieux Zengid Nûr al-dîn Mahmûd, après sa conquête de Damas en 549/1154, Surkhâk limita manifestement les nouvelles constructions jusqu’à sa mort en 555/1160. Reçu en héritage pendant une courte période par son gendre Ibn al-Hâjib, le Hauran tout entier revint à Siddîq Ibn al-Jawlî, dont l’activité architecturale resta limitée à des constructions plutôt modestes, comme l’indique une inscription de 561/1165-1166. Après sa mort, en 571/1175-1176, lorsque le gouvernorat passe à son neveu, aucune autre construction n’est connue sous cette nouvelle autorité.

Après le renouveau impressionnant observé dans les premières décades des 6e/XIIe siècles, Bosra a clairement traversé une période de déclin, jusqu’à la période ayyoubide. La province du Hauran fut probablement d’abord confiée par Salâh al-dîn à son fils al-Afdal ‘Alî avec le fief de Damas ; mais plus tard, il octroya le fief de Bosra à son plus jeune fils az-Zâfir Khidr. La situation ne changera de façon radicale que pendant le règne d’al-‘Âdil Abû Bakr (592/1196-615/1218), qui reçut à Damas l’investiture comme chef de la famille ayyoubide en 597/1201. Peu de temps après, les constructions commencèrent simultanément sur les citadelles de Damas et de Bosra en 599/1202-1203. À partir de la mort d’al-‘Âdil, la cité de Bosra fut gouvernée par des membres de la famille ayyoubide.

Le fief de Bosra passa en 615/1218 aux mains du plus jeune fils d’al-‘Âdil, as-Sâlih Ismâ‘îl, dont la longue période de gouvernement peut être considérée comme l’âge d’or de la ville musulmane. Tout d’abord, les bâtiments domestiques et administratifs de la citadelle furent améliorés, de 620/1223-1224 à 629/1231-1232, et plus tard, quand as-Sâlih Ismâ‘îl occupa avec succès le trône de Damas, de 637/1240 à 643/1245, la défense extérieure de la citadelle de Bosra fut renforcée.

Ses successeurs à Damas exercèrent aussi leur pouvoir à Bosra. Presque tous continuèrent à améliorer les fortifications, anticipant ainsi l’attaque de l’armée mongole. Ce fut le cas d’as-Sâlih Ayyûb, qui régna à Damas de 643/1245 à 647/1249, mais pas de son fils al-Mu‘azzam Turân Shâh (647/1249-648/1250), dont le règne fut trop court pour un programme de construction. Finalement, al-Nâsir Yûsuf (648/1250-658/1260) suivit le modèle de ses prédécesseurs, mais en vain, car les deux places fortes, Damas et Bosra, furent conquises par les Mongols en 658/1260.

Les Mamelouks

Pendant la période mamelouke, la ville de Bosra a manifestement vécu sur son passé. Une fois que la citadelle fut restaurée par le sultan mamelouk az-Zâhir Baybars (658/1260-676/1278) et une garnison peu importante installée, on ne compte apparemment que deux nouvelles constructions sur plus d’un siècle.

La première, le minaret attaché à la mosquée de Fâtima en 705/1306, est de dimensions tout à fait modestes, mais le second, le hammam Manjak, construit en 773/1372, est l’expression du plus haut niveau de technique architecturale, transmise dans le Hauran par des spécialistes de la capitale, Damas. La ville musulmane a manifestement prospéré pendant tout le 8e/XIVe siècle comme un centre régional actif, comme cela est confirmé par les sondages dans les thermes du Sud. Néanmoins, les trouvailles numismatiques s’arrêtent vers la fin de ce siècle, ce qui indique une récession nette, peut-être causée par la conquête désastreuse de la capitale syrienne par l’empereur mongol Timur (plus connu sous le nom de Tamerlan) en 802/1400.