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Il est d’autres pratiques religieuses qui ont été observées à Acy-Romance.
Ainsi, les quatre fosses quadrangulaires ayant accueilli des quantités impressionnantes de quartiers de brebis occupent un emplacement privilégié au centre du village. La composition de ces dépôts, la présence de nombreux foetus, l’âge commun des animaux, l’ensevelissement immédiat, tout concorde pour y voir la part des dieux.
C’est un tout autre aspect de pratiques religieuses que revêt la découverte de plus de 1500 fers de lances miniatures dans le comblement supérieur d’un puits. Si le dépôt d’armes sacrifiées dans les sanctuaires celtiques est récurrent, que quelques armes miniatures se retrouvent communément dans les temples romains, la consécration d’innombrables armes miniatures ne se rencontre que dans le territoire septentrional des Rèmes.
Hécatombes de brebis
Deux de ces fosses sont à proximités de l’enclos central de l’âge du Bronze, deux autres sont à une cinquantaine de mètres au Sud. La mieux conservée recèle des quantités d’os de brebis (3500 restes d’adultes et 700 de fœtus) et illustre ce que devaient être les autres. Dans cette fosse, 150 sujets sont représentés. Il s’agit de brebis gravides qui ont été abattues, découpées et dont les entrailles et quelques morceaux ont été enterrés immédiatement. Les fœtus indiquent un abattage fin décembre ou début janvier. Banquets et parts destinées aux dieux est évidemment l’interprétation qui se prête le mieux à ces restes et au mode d’enfouissement. Ces événements se déroulent entre 90 et 60 av. J.-C.
Des lances miniatures
Au Sud de l’habitat le cône d’effondrement des parois supérieures d’un puits gaulois était comblé de plus de 1500 lances miniatures en fer, quelques unes réelles détruites intentionnellement, auxquelles étaient mêlés 45 vases miniatures, quelques fibules et monnaies et deux fragments d’une même bouterolle en bronze de fourreau d’épée. Ce puits fouillé sur 7,60 m de profondeur a également servi de dépotoir mais aussi de latrines. Quelques os de deux individus, aux épiphyses rongées par les chiens ne sont pas sans suggérer l’abandon de cadavres ou de pratiques dont nous n’avons pas idée.
Les armes miniatures se retrouvent en quantité dans deux sanctuaires situés sur le territoire septentrional des Rèmes : Bâalons-Bouvellemont (fers de lances), Mouzon « le Flavier » (boucliers et épées miniatures). Acy-Romance est le premier site à en livrer une telle quantité, bien supérieure à ce qui est connu sur ces deux lieux de culte.
Des faits cultuels discrets
A Acy-Romance les manifestations religieuses publiques, avec sacrifices, banquets et hécatombes de brebis, côtoient un culte à une divinité guerrière. Certains bâtiments peuvent être reconnus comme étant des lieux de sacrifices et de dévotions. En revanche des manifestations d’ordre privé se devinent au travers de certains objets déposés isolément et dans l’association récurrente de quelques vases particuliers. Deux grandes catégories de manifestations cultuelles peuvent être reconnues. La première a un caractère communautaire : dépôt des lances chez les forgerons, abattage d’animaux chez les éleveurs pour une redistribution à l’ensemble de la population ou sacrifices humains et animaux dans le quartier religieux.
La deuxième catégorie peut être le dépôt d’un seul outil dans des structures particulières comme un soc d’araire, une hache ou un crâne de taureau. À chacun son dieu et à chaque dieu ses offrandes. Le dépôt de meules dans des silos chez les agriculteurs peut relever de la même démarche ou n’être que le témoignage d’un geste propitiatoire. Là aussi ces objets sont représentatifs de la catégorie sociale au sein de laquelle ils se trouvent.
Quant aux vases à piédouche ils révèlent la pratique de libations dans la sphère familiale, dans toutes les classes de la population, hormis les dépendants dont nous ne connaissons que peu de choses. Cette pratique se retrouve sous forme de seaux et vases métalliques dans certaines tombes jusqu’au début de notre ère. Quelques gestes sacrificiels, eux aussi restreints à la famille, sont représentés par le bris ritualisé de fibules.