La ville se met à l'abri du milieu du XIVe au XVIe siècle

Dès le début de la guerre de Cent Ans, l'abbaye se préoccupe de sa protection. Les chroniques rapportent que, dès 1347, on commence à "faire des fosses en l'environ de la ville". C'est probablement de cette époque que date un fossé découvert en fouille dans le quartier Saint-Remi. À partir de 1356, l'abbé et le régent Charles, le futur Charles V, joignent leurs efforts pour édifier un rempart. Mais, dix ans plus tard, Saint-Denis n'est toujours pas en état d'être défendue : aussi le roi ordonne-t-il que le faubourg Saint-Remi soit rasé. La ville se replie alors derrière une enceinte au périmètre plus réduit. Elle englobe le bourg monastique, Saint-Marcel et le quartier de l'Estrée, mais exclut Saint-Nicolas-des-Aulnes, Saint-Remi et la majeure partie du verger de l'abbaye, la Couture, que l'on entoure d'un simple mur de clôture. La nouvelle enceinte est percée de cinq tours-portes établies sur les principaux axes de circulation.

Restitution de l'ensemble monumental. État à la fin du XVIe siècle. Établie sur la base de dessins réalisés par Sylvain Le Stum sous la direction de Béatrice Jullien. © Ministère de la culture / M. Wyss ; A.-B. Pimpaud ; M.-O. Agnes

Les désastres de la guerre de Cent Ans 

De 1410 à 1436, la ville est assaillie successivement par les Bourguignons, les Armagnacs et les Anglais. En ces temps de guerre, Saint-Denis, qui contrôle l'accès nord de Paris, est un site stratégique car, en l'occupant, on peut priver la capitale de ravitaillement en la coupant des campagnes fertiles du Pays de France. L'abbaye est elle-même une place à prendre. Elle conserve les reliques du saint patron, garant du royaume, et entretient des liens anciens et privilégiés avec la royauté. De plus, son trésor, l'un des plus riches de l'Occident médiéval, attire les convoitises car il permet de financer les guerres. Progressivement, les troupes de passage transforment le complexe abbatial en citadelle. En 1435, la ville est reprise aux Anglais par Dunois, le Bâtard d'Orléans. L'enceinte urbaine est partiellement démantelée et la ville se vide de ses habitants qui cherchent refuge à Paris.

L'évolution urbaine stagne

Durant cette période mouvementée, les réalisations architecturales ne concernent plus guère que les édifices religieux. L'église Saint-Marcel est alors agrandie et dotée d'une crypte-ossuaire. En revanche, la construction civile stagne. L'abandon d'une partie de l'habitat favorise le remembrement des petites parcelles. C'est uniquement le long des places et des rues commerçantes que le front continu des petites maisons se maintient. Sur le plan économique, la ville entre alors dans une période difficile. Parallèlement, le revenu de l'abbaye est grevé par le déclin de la foire du Lendit qui reprend en 1444.

Les signes d'une reprise économique

En 1529, François Ier impose à l'abbaye comme abbé commendataire le cardinal Louis de Bourbon, un membre de la famille royale ; il inaugure ainsi une succession de neuf abbés, ecclésiastiques séculiers ou laïcs. Pour renouer avec le faste des abbés du XIVe siècle, le cardinal fait entreprendre, à partir de 1530, la construction d'un somptueux logis. Vers 1572, Catherine de Médicis met en chantier le mausolée des Valois, situé au nord de l'abbatiale. L'activité artisanale locale bénéficie de ce regain dans la construction. Les comptes de l'abbaye citent les marchands et les artisans qui participent à ces travaux et qui, pour la plupart, habitent Saint-Denis.

Nouveaux malheurs...

En 1567, Saint-Denis est à nouveau bouleversée par l'occupation huguenote. Les moines se réfugient avec le trésor à Paris, abandonnant le monastère aux hérétiques qui y font nombre de dégâts. Les églises de l'ensemble monumental sont, pour la plupart, dévastées. Saint-Paul est quasiment détruite, ce qui oblige les chanoines à se replier dans une portion de son collatéral aménagé en chapelle dédiée à saint Pantaléon. De même, Sainte-Geneviève, Saint-Michel-du-Degré et Saint-Barthélemy sont endommagés. Les sièges des trois paroisses sont alors réunis en un bâtiment, partiellement reconstruit, dont l'archéologie a révélé un chevet singulier à trois absidioles. Or, les annales rapportent que leurs trois curés étaient tenus de vivre "paisiblement ensemble jusqu'à ce que deux d'iceux étant morts, leurs titres seroient supprimés et que le dernier survivant demeuroit seul curé". Le chevet, qui probablement abritait trois autels, matérialise donc cet arrangement provisoire.