Le château royal de Shabwa, dénommé Shaqîr, s’inscrit bien dans cette tradition sud arabique de hautes maisons servant de forteresses.

Situé contre et même au-dessus de la porte principale n° 3, il assure la défense de tout ce secteur, dominant tous les édifices environnants (n°53 et 52, etc.). Il est conçu comme une tour, munie d'accès compliqués, il multiplie les étages dépourvus de larges ouvertures (du moins au rez-de-chaussée) et il est donc aisé de s'y retrancher et de soutenir un siège pourvu que l'on ait accès à l'eau par son bassin latéral.

Le programme décoratif des derniers états du château de Shabwa témoigne d’un art de cour unique en Arabie du Sud au IIIe siècle.  Mentionnons tout d’abord la décoration des portiques du bâtiment B et ses meneaux octogonaux de pierre ornés de rinceaux et surmontés de chapiteaux à griffons d’inspiration orientale (parthe ou sassanide). Les peintures de ses portiques, personnage retenant son cheval, femme voilée couverte d’une coiffe compliquée ou couple de personnages se rattachent bien à des modèles orientaux. On peut supposer que des peintres probablement syriens sont venus un temps à la cour royale. 

De même, des bronziers locaux, forgeant des statues humaines et animales, et des frises de bronze ornées d’archers, de lions ou de griffons, travaillent de concert avec des maîtres venus d’Alexandrie ou de Syrie. Ce sont eux qui ont assemblé la statue monumentale du « grand monument » tout comme les statues des hautes-terres du Yémen et de leurs environs (chevaux de Mâ’rib, statues des rois himyarites, têtes de Ghaymân ou  de Qaryat al-Faw, etc). 

Finalement, l’hellénisation des arts, aux IIe et IIIe siècles, n’a fait qu’effleurer Shabwa et le wâdî Dura’, mais guère la vallée du Hadramawt où - il est vrai - les centres urbains ont déjà décliné.