Amphissa
Cité-État dans l'Antiquité, évêché et seigneurie à l'époque des croisades, chef-lieu d'une circonscription de l'empire ottoman puis d'une préfecture de l'État grec moderne, Amphissa a connu au moins huit campagnes de fortifications différentes, chaque nouveau programme réaménageant les vestiges plus anciens.
Dans une approche résolument trans-période et interdisciplinaire, une équipe de chercheurs grecs et français étudie dans la longue durée, de l'époque archaïque (VIe s. av. J.-C.) à la guerre civile grecque (1946-1949), les rapports entre la ville et ses fortifications d'une part, l'évolution des techniques de fortification de l'autre.
Au cœur de la cité antique : une ville et son acropole
Au IVe s. av. J.-C., Amphissa est une cité-État (polis). La ville et la colline qui la surplombe (son acropole) sont réunies dans un système de fortification unitaire qui vise d'abord à protéger les habitants, leurs biens, leurs institutions et leurs sanctuaires. L'acropole est réputée pour ses défenses et parvient même à repousser l'envahisseur romain en 190 av. J.-C. ! Les gens d'Amphissa sauvent ainsi leurs vies et leurs biens et peuvent bénéficier d'une paix négociée.
Le château : refuge et instrument de pouvoir
Au Moyen Âge, la signification des remparts a changé. La Quatrième croisade s'empare de Constantinople en 1204 et des chevaliers d'origine française s'emparent de l'antique Amphissa, désormais connue sous le nom de Salone/La Sole. Sur le site de l'acropole s'élève alors le château des seigneurs d'Autremoncourt. Outre le château, seule la partie haute de la ville est fortifiée, afin notamment de contrôler l'accès à la seule source du site.
Un jalon important de l'architecture militaire ottomane
Précocement occupée par les nouveaux maîtres de la Grèce, le château et ses pentes font l'objet de plusieurs campagnes de fortifications au XVe et au XVIe afin d'adapter les fortifications au développement des armes à feux. Le château est alors occupé par une garnison qui s'assure de la fidélité d'une ville demeurée à majorité chrétienne.
Un haut lieu de la Guerre d'indépendance grecque
Après la libération de la ville basse dès le 27 mars 1821, la capitulation du château devant les insurgés le 10 avril 1821 donne à la jeune révolution grecque sa première grande victoire. Démontrant la longue durée des enjeux tactiques, c'est la prise de contrôle par les Grecs de la source fortifiée depuis le Moyen Âge qui emporte la décision.
Aujourd'hui placé sous l'autorité du service archéologique grec (Ministère hellénique de la culture et des sports/fond des revenus archéologiques), le site est étudié depuis 2019 par une équipe internationale qui bénéficie du soutien de la commission des fouilles du Ministère de l'Europe et des Affaires Etrangères (MEAE – Programme "Fortifications de Locride et de Phocide") et de l'École française d'Athènes (EfA). Les travaux de relevés, de modélisation et d'étude des vestiges permettent de mieux comprendre l'histoire des fortifications du site et l'évolution de leur signification au fil des époques.
Un programme de fouille devrait très prochainement augmenter considérablement nos connaissances sur un site emblématique de l'histoire des fortifications grecques.
Liens utiles
- Page de présentation du programme de recherche « Fortifications de Phocide et de Locride »
- Présentation du projet d’étude de la défense de la ville d’Amphissa
Bibliographie
A. Psalti, A. Tsaroucha, N. Kyriakidis, N. Petrochilos, St. Zugmeyer, N. Faucherre, D. Ollivier, V. Ory, A. Loulelis, « Les fortifications d’Amphissa, de l’Antiquité à l’époque contemporaine : premières observations de terrain et essai de bilan », BCH, 143.1, 2019, p.321-346 ; DOI: https://doi.org/10.4000/bch.792
Fadin L., Faucherre N., Kyriakidis N., Petrochilos N., Ollivier D., Zugmeyer St. et al. « Le kastro d’Amphissa, présentation et premier retour de mission », Communication à la table-ronde internationale "Architecture militaire, une culture partagée entre Grèce et Provence", Aix-Marseille Université 23-24/11/17, organisée par N. Faucherre, N. Kyriakidis et St. Zugmeyer, BCH,143, 2019
A. Psalti, A. Tsaroucha, V. Ory, N. Petrochilos, N. Kyriakidis, St. Zugmeyer, N. Faucherre, D. Ollivier, A. Loulelis, « The Fortress of Salona (Amphissa) and its Importance during the Ottoman Period », in Fortifications of the Ottoman period in the Aegean, [Actes du colloque de Mytilène 30-31 octobre 2018]
Οικονόμου Στ., Ποθούντες ΄Αμφισσαν. Η αρχαία Άμφισσα στα πλαίσια της, 2010
Μελισσάρης Θ.Κ., Η ιστορία της Αμφίσσης και των πέριξ κωμοπόλεων και χωρίων, 1924
Voir aussi
La fouille des fortifications de Philomélos à Delphes dans le cadre du programme « Fortifications de Phocide et de Locride »