Tureng Tépé
Le site archéologique de Tureng Tépé, situé dans le Nord de l’Iran, a été fouillé dans les années 1960-1970. Ces travaux ont livré les vestiges d’une longue succession d’occupations s’étalant sur plusieurs millénaires depuis le Chalcolithique jusqu’à l’époque moderne.

Connu dès le XIXe siècle, le site de Tureng Tépé est localisé dans la région de Gorgān, située au sud-est de la mer Caspienne. Cette région de carrefour entre le plateau iranien et l’Asie Centrale, est délimitée par la frontière irano-turkmène au nord et les monts Elbourz au sud. Sur près de 35 hectares, le site se compose de plusieurs tépés ou tells organisés autour d’une dépression centrale correspondant à un lac artificiel saisonnier.
Une séquence d’occupation plurimillénaire
Les fouilles françaises à Tureng Tépé (1960-1977), menées sur une surface de plus de 3 500 m2, ont révélé l’existence d’un site multi-périodes dont la séquence d’occupation couvre près de sept millénaires, depuis la protohistoire jusqu’à l’époque moderne. Si l’occupation néolithique n’est attestée que par la présence de tessons de céramique, le sondage stratigraphique mis en œuvre de 1960 à 1965 sur le Petit Tépé a révélé une succession de phases d’occupation allant du Chalcolithique final (fin du IVe millénaire) au début du IIe millénaire av. J.-C., entrecoupées de périodes d’abandon.
Une terrasse monumentale à l’âge du Bronze
La notoriété du site de Tureng Tépé tient en grande partie à la découverte d’une haute terrasse de briques, mise au jour sur le tépé principal du site. Cet édifice exceptionnel, attribué à l’âge du Bronze Moyen (vers 2500-1800 av. J.-C.) est essentiellement constitué de grandes briques crues et « demi-cuites », de forme rectangulaire, liées au mortier de terre. Cette haute terrasse correspondait certainement à une sorte de socle rectangulaire monumental d’au moins 7 500 m2, encadré de deux paliers bas et flanqué d’au moins un accès latéral au sud. En dépit de sa monumentalité et du soin apporté à sa construction, la haute terrasse de Tureng Tépé ne constituait sans doute qu’un sous-bassement visant à surélever des constructions, malheureusement détruites, qui devait prendre place sur la surface de près de 5 500 m2 de l’étage supérieur.
Des forteresses à l’âge du Fer
Les fouilles françaises ont aussi permis de mettre en évidence une occupation continue du site de Tureng Tépé durant l’essentiel du Ier millénaire av. J.-C. Cette nouvelle occupation, près d’un millénaire après l’abandon de la haute terrasse de l’âge du Bronze, est représentée par une succession d’établissements fortifiés édifiés sur les ruines de la haute terrasse. Ces vestiges n’ayant été que très partiellement dégagés, il est difficile d’estimer la taille réelle de ces occupations successives ainsi que leur diversité spatiale et fonctionnelle. Toutefois, en se basant sur les éléments architecturaux mis au jour et sur la morphologie du Grand Tépé, on peut évaluer la superficie maximale des établissements de l’âge du Fer à environ 0,4 hectare.
Tureng Tépé est ensuite réoccupé à plusieurs reprises, durant l’Antiquité à l’époque parthe, puis sous l’Empire Sassanide (IIIe-VIIe siècles apr. J.-C.), avec l’édification d’un fort sur le Grand Tépé, au-dessus des ruines des occupations antérieures. D’autres vestiges attestent de plusieurs phases de réoccupations, au VIIe siècle avec la construction d’un « temple du Feu », puis aux époques islamiques (VIIe-XIVe siècles apr. J.-C.) et même jusqu’au XIXe siècle apr. J.-C.
Bien que des sondages aient été réalisés en 1931 sous la direction de l’archéologue américain Frederick R. Wulsin, les principales fouilles réalisées à Tureng Tépé sont celles menées de 1960 à 1977 par la Mission archéologique française dirigée par Jean Deshayes, professeur à l'Université de Lyon II puis à l'Université de Paris I. Consistant en treize campagnes d’un à deux mois de terrain, elles ont été financées par le ministère des Affaires étrangères français, le CNRS et l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Ces fouilles, qui ont par ailleurs bénéficié de l'appui technique et administratif du Centre iranien de recherche archéologique, ont rassemblé près de 65 participants, archéologues, dessinateurs, architectes ou étudiants. Les milliers de documents (photographies, relevés en plan et en coupe, dessins d’objets, carnets de notes…) produits lors de ces campagnes de fouilles sont aujourd’hui conservés au Pôle archives de la MSH Mondes à Nanterre. Bien que la grande majorité des objets découverts lors de ces fouilles soit demeurée en Iran, le musée du Louvre conserve et expose plusieurs dizaines de vases datés de l’âge du Bronze et d’autres objets tels que des figurines anthropomorphes et zoomorphes, des outils en silex taillé et des éléments de parure.