Chili - Il y a 1000 ans

Nomades marins du détroit de Magellan

La mission française a entamé la fouille d'un nouveau site à l'extrémité du continent sud-américain, tout à côté du phare de San Isidro. Il vise à étudier les pratiques techno-économiques et les voies de mobilité des nomades marins du détroit de Magellan, au cours du dernier millénaire.

Phare San Isidro, Chili © Mission archéologique de Patagonie et Terre de Feu

Le site de San Isidro a été l'objet d'un sondage en 2024 révélant une date de 1000 apr. J.-C. au fond. Sa fouille, commencée en 2025, se poursuivra en 2026. Il a révélé plusieurs occupations de nomades marins axées vers la chasse aux manchots et aux albatros et, saisonnièrement, aux jeunes pinnipèdes.

Des campements de nomades marins

Après avoir fouillé, en 2019-2020, un campement de nomades marins, Batchelor (en cours d'étude), à peu de distance du débouché du détroit de Magellan sur l'océan Pacifique, la mission archéologique de Patagonie a entrepris une nouvelle prospection, en 2024, entre le phare de San Isidro et le Cap Froward, à la pointe sud de l'Amérique du Sud.

Parmi les sites repérés, l'un d'entre eux, au pied du phare de San Isidro, a été sélectionné pour une fouille, actuellement en cours.

Les objectifs visaient à observer la relation entre deux sites de Batchelor et San Isidro, distants d'une centaine de kilomètres, afin d'étudier les voies de mobilités des nomades marins entre la partie centrale du détroit et sa sortie occidentale, malgré l'obstacle du dangereux Cap Froward ; à examiner les caractéristiques culturelles de ces groupes afin de mesurer leur degré de communauté, et à observer les particularités économiques des sites, reflets des différents écosystèmes locaux et de leur évolution. Enfin, on a cherché à mesurer l'impact du contact des européens sur ces chasseurs-cueilleurs nomades.

Un site de chasse au manchot

Le site de San Isidro est un vaste amas coquillier, au fond duquel un foyer a été daté de 1000 ans. Les couches postérieures, marquées par plusieurs foyers (en cours de datation), témoignent d'une importante chasse aux manchots, laissant supposer l'existence, autrefois, en cet endroit, d'une véritable colonie. Les nombreux albatros consommés sur le site ont pu être chassés sur l'ilot sur lequel est construit le phare et plusieurs de leurs os longs ont été transformés en tubes finement gravés dont on sait par l'ethnographie qu'ils pouvaient servir à boire directement dans les ruisseaux, l'eau étant rare sur cette péninsule. La présence de plusieurs jeunes pinnipèdes témoigne d'au moins un épisode de chasse estivale dans la dernière occupation. L'industrie lithique est réalisée sur différentes roches dont est exclue l'obsidienne verte, marqueur typique du site de Batchelor et des sites maritimes que l'on retrouve plus à l'ouest. 

Le site a reçu en janvier 2025 la visite d'une des dernières familles kaweskar vivant dans la zone.