Sénégal - il y a 1000 ans

Wanar

Une nécropole mégalithique d'époque protohistorique, classée au Patrimoine Mondial de l'Humanité : le site de Wanar n'avait jamais fait l'objet de fouilles archéologiques précédemment.

Quatre des vingt-et-un monuments mégalithiques de Wanar, au sud-est. Vue du nord-ouest (© SEPSEN - UMR 6566/ Cliché L. Laporte).

Les mégalithes du Sénégal et de la Gambie se présentent dans le paysage comme autant de cercles de pierres dressées, pourvus à l'est d'une pierre en position frontale, parfois alignées nord-sud lorsqu'il en est plusieurs. Parmi celles-ci figurent quelques pierres bifides, emblématiques du mégalithisme sénégambien.

La nécropole mégalithique de Wanar

La nécropole mégalithique de Wanar n'avait jamais fait l'objet d'aucune fouille archéologique avant la réalisation de nos propres sondages en 2005. Elle fut classée au titre du Patrimoine Mondial de l'Humanité en 2006, conjointement avec le site de Sine Ngayene (Sénégal) et ceux de Wassu et de Ker Batch (Gambie). À partir de 2008 et jusqu'en 2017, elle fit l'objet d'une campagne de fouille annuelle en partenariat avec nos collègues sénégalais, sous la direction de H. Bocoum, pour la partie sénégalaise, et de L. Laporte, pour la partie française.

Cette nécropole compte vingt-et-un monuments mégalithiques dont les ruines se présentent sous la forme de cercles de pierres dressées disposant d'une pierre en position frontale à l'est, voire d'un alignement de pierres frontales. Dans un seul cas, il s'agit de deux lignes parallèles de pierres dressées en position frontale, et dans un autre de deux cercles emboîtés. Parmi les pierres disposées en position frontale, dix-sept correspondent à des pierres bifides, également appelée pierres en lyre lorsque les deux branches montantes sont reliées par un tenon. Cette concentration de pierres en lyre est exceptionnelle, avec plus du tiers de toutes celles répertoriées au Sénégal et en Gambie. Le site de Wanar a livré la seule carrière de pierres en lyre connue à ce jour.

Les ruines mégalithiques situées au sud de la nécropole se caractérisent par la présence de monolithes étroits et allongés, alors que celles au nord présentent des monolithes courts et trapus. Ces ruines rendent compte d'édifices bâtis à l'image d'une maison des morts, sur toute leur élévation dans le premier cas, comme si elles étaient pour partie enterrées dans le second. Six de ces monuments ont été intégralement fouillés, trois de chacun de ces deux types. Les premiers furent édifiés plutôt vers le XIe siècle apr. J.-C. et les second jusqu'à un siècle plus tard. Seules les carrières des seconds ont été identifiées, quelques centaines de mètres au nord-ouest de la nécropole.

Les monuments se tiennent à l'emplacement de tombes sous-jacentes, marquées par la présence de dépôts secondaires d'ossements humains, au sein d'un espace sépulcral qui a parfois également connu un mode de fonctionnement similaire à celui d'une sépulture collective. De tels dépôts ont été réalisés au sein de fosses, ou chambres funéraires, creusées dans le sol, en forme de cloche ou de silo. L'embouchure de la fosse fut ensuite définitivement scellée par la construction d'une plateforme quadrangulaire construite en terre crue, sous laquelle on introduit parfois de nouveaux dépôts d'ossements humains. Une unique pierre dressée se tenait alors à l'ouest, qui fut ensuite basculée au sein du cercle de pierres dressées.

Le mobilier associé aux dépôts sépulcraux comprend des armes en fer, mises hors d'usage, et des éléments de parure : bracelets en métal, perles en cornaline ou de très rares objets en or. De tels dépôts sont directement associés aux ossements humains. En revanche, les dépôts de céramique n'interviennent guère avant la construction du mégalithe, mais le plus souvent se poursuivent même après sa ruine. Ils sont associés à des rites commémoratifs, tout comme peut-être la mise en place de pierres en position frontale. Des vases carénés au fond percé sont alors déposés avec l'embouchure contre le sol, c'est-à-dire dans une position similaire à celles de vases utilisés comme couvercles sur une urne funéraire.

Nous retrouvons ici les trois temps des funérailles traditionnelles, encore de nos jours en Afrique de l'Ouest : la mise au tombeau du défunt (dépôts sépulcraux), puis les grandes funérailles (ici associées aux actions collectives liées à la construction du monument mégalithique), puis enfin l'accession de certains d'entre eux au statut d'ancêtre (ici marquée par des rites commémoratifs), sont autant d'étapes dans un processus de deuil parfois longuement étalé dans le temps.

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