Préhistoire en Papouasie Nouvelle Guinée
Isolé depuis 50 000 ans sur l’île de Nouvelle Guinée, les populations Papous ont développé une diversité culturelle et génétique unique au monde. Cette richesse est le fruit d’adaptations locales mais aussi de métissages génétiques avec d’autre espèce d’Homo.
En combinant fouilles archéologiques et analyses génétiques, nous apportons des éléments pour mieux comprendre le peuplement et l’adaptation des populations Papoues – dans leurs composantes biologiques, culturelles, et techniques – au cours des cinquante derniers millénaires en Papouasie Nouvelle Guinée.
Point d’entrée et dispersion en Papouasie Nouvelle Guinée
Nos recherches suggèrent une colonisation il y a 50 000 ans de la Papouasie Nouvelle Guinée – formant alors avec l’Australie le continent de Sahul – depuis le sud-est de l’île, après la traversée de la plaine de l’Arafura aujourd’hui sous les eaux. S’ensuit une dispersion vers les Hautes-Terres et les vallées d’altitudes (>1500 m) en remontant les principales rivières (Fly, Purari) et leurs affluents. Ce scénario exclut donc une dispersion ouest-est en suivant la cordillère centrale, parfois évoquée. Deux groupes principaux de colons ont été identifiés de par la trace génétique distincte qu’ils ont laissée dans les populations Papoues. Cependant leur spécificité culturelle et technique ne peut pas encore s’appréhender sur la base des données archéologiques disponibles.
Un retard dans le peuplement de l’intérieur
Etonnamment, le peuplement de l’intérieur de l’île de la Nouvelle Guinée, et notamment des larges vallées d’altitude telle celle de la Wahgi, ne débute que 30 000 ans après le peuplement des régions côtières. Ce délais est visible à la fois dans les données génétiques – absence de diversification génétique et d’expansion démographique durant cette période – que dans les données archéologiques, avec des sites d’occupation humaine d’altitude uniquement datés des derniers 20 000 ans.
Rencontre avec l’homme de Denisova
Sachant que les populations humaines ont su s’adapter et peupler dans leur migration depuis le berceau Africain jusqu’à la Papouasie Nouvelle Guinée tous les milieux rencontrés, ce retard dans le peuplement de ces régions intérieures est surprenant. Plusieurs causes ont pu jouer mais nos récents travaux soulignent qu’un événement de métissage avec l’homme de Denisova aurait eu lieu en Papouasie Nouvelle Guinée (5 à 6% du génome Papou provient de Denisova), et aurait laissé une signature génétique plus forte dans les populations des hautes vallées de l’intérieur de l’île, où se concentre nos fouilles et prospections archéologiques. La présence d’un compétiteur tel que l’homme de Denisova en Nouvelle Guinée aurait donc pu retarder la dispersion d’Homo sapiens dans l’intérieur des terres.
Ressources végétales et ancienne horticulture
Le métissage avec Denisova a permis l’acquisition de gènes impliqués dans le métabolisme des lipides. Ceci a pu favoriser l’utilisation des ressources végétales et compenser la rapide disparition de la mégafaune dans les millénaires suivant l’arrivée d’Homo sapiens. L’utilisation des végétaux comme ressource alimentaire principale est visible dans le bol alimentaire des populations actuelles, et dans les restes archéologiques des sites que nous fouillons (Manim et Paimbunkanja). La Papouasie Nouvelle Guinée présente des traces d’agroforesterie qui datent des premiers peuplements, et les plus anciennes traces d’horticulture au monde (9 000 ans), comme le matériel lithique que nous mettons au jour lors de nos fouilles en témoigne.
Le projet est soutenu par le ministère de l'Europe et des Affaires Étrangères sur l’avis de la Commission des fouilles.