Il y a 30 000 ans

La grotte de Cussac

La grotte de Cussac a été découverte en septembre 2000 par le spéléologue Marc Delluc (1957-2017). Elle est exceptionnelle par l'association d'un art pariétal et de sépultures humaines datant d'environ 30 000 ans, de la période dite du Gravettien.

Détail du Grand Panneau de la grotte de Cussac. © N. Aujoulat. Ministère de la Culture

Classée monument historique dès sa découverte puis inscrite au titre des sites depuis 2013, la grotte n’est pas ouverte au public tant pour des raisons d’accès que de conservation. La galerie mesure 1,6 km de long, et n’est qu’en partie explorée et étudiée.

Découvrir la grotte

La grotte de Cussac, longue de plus d’un kilomètre et demi, est l’une des plus grandes du Périgord. On y pénètre par un passage modeste, de nos jours encombré par un éboulis qui bouche l’ancien porche qui devait être plus vaste. Ce dernier a été franchi par Marc Delluc au cours d’une opération dangereuse visant à libérer la voie qui l’amena à une galerie vierge. Depuis, le tunnel d’accès a été consolidé pour en faciliter le parcours.

Il débouche dans une magnifique galerie aux sols vierges qui serpente vers l’ouest sur plus d’un kilomètre (la « branche » amont) et sur près de 600 m côté est (la « branche » aval). Le cheminement balisé y est unique et suit un parcours plus ou moins accidenté : passages surbaissés ou perchés et passages étroits en forme de chatières et chaos de blocs à contourner ou à escalader. La plupart du temps, le cheminement s’effectue cependant sans difficulté majeure en suivant les méandres de l’ancienne rivière souterraine qui s’est depuis enfoncée et que l’on perçoit à la faveur de quelques « puits ».

Entre -35 000 ans et -26 000 ans : les Gravettiens

Les Gravettiens sont des Homo sapiens, ou Hommes anatomiquement modernes descendant des premiers groupes arrivés en Europe vers -45 000 ans. Leur anatomie, identique à la nôtre, est assez bien connue grâce à de nombreuses sépultures ou des restes humains découverts à travers toute l’Europe, du Portugal aux plaines russes, aire d’extension du Gravettien ou de ses équivalents contemporains.

Le terme « Gravettien » désigne la période succédant à l’Aurignacien (entre -34 000 et -25 000 ans environ) et tire son nom du site de la Gravette (Dordogne). Sa vaste extension sur l’ensemble de l’Europe est remarquable. Le Gravettien apparaît lors d’une phase climatique tempérée de la dernière glaciation et se développe durant le Pléniglaciaire supérieur rythmé par une succession de subdivisions reconnues par l’évolution de l’équipement (outils, armes) et des savoir-faire (évolution des techniques de fabrication de l’industrie lithique ou osseuse). En effet, le Gravettien est subdivisé en plusieurs stades caractérisés par des équipements techniques en silex parfois différenciés (pointes de la Gravette, pointes en silex dites « à soie » de la Font-Robert, burins de Noailles, pointes de sagaies d’Isturitz, etc.).

Ces équipements techniques renseignent sur l’extension géographique des groupes humains, comme la phase moyenne contemporaine des œuvres de Cussac qui s’étend des Pyrénées à l’Italie tyrrhénienne sans franchir la Loire vers le nord.

La parure et l’art mobilier (statuettes féminines notamment) et les nombreuses sépultures, souvent bien conservées et spectaculaires, indiquent une société complexe, sophistiquée, spécialisée, voire en partie hiérarchisée.

L’art pariétal gravettien se concentre dans les principales régions du Sud-Ouest européen : dans les grottes du Quercy, du Périgord, de la Corniche cantabrique, du piémont pyrénéen, du Sud de la péninsule Ibérique, mais il existe aussi en Mayenne ou dans l’Yonne (Grande grotte d’Arcy).

Ce monde pictural gravettien se caractérise par des conventions graphiques (animaux ou représentations féminines aux corps déformés, aux membres inachevés, et aux très petites têtes), techniques (abondance du pochoir) ou thématiques (empreintes de mains négatives).

On note aussi les premiers témoignages spectaculaires de sculpture en bas-relief, comme dans les abris de Laussel et du Poisson en Périgord.

Diffusion et valorisation

Jusqu’à sa découverte en 2000, la grotte de Cussac était scellée, conservée depuis le passage des hommes il y a 30 000 ans. Elle est donc totalement préservée.

La grotte de Cussac est fermée au public, à l’instar d’autres grottes ornées, telles que Lascaux, Chauvet ou Cosquer car les milieux souterrains, et en particulier les grottes ornées, bénéficient de conditions naturelles de conservation, mais à l’équilibre fragile. Il ne faut donc pas les bouleverser.

En octobre 2024 ouvrira une exposition consacrée à la grotte de Cussac au Buisson de Cadouin, réalisée par le Conseil départemental de la Dordogne en partenariat avec la mairie du Buisson de Cadouin et le ministère de la Culture – Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) de Nouvelle-Aquitaine. Elle présentera notamment des fac-similés du panneau de la Découverte et le Locus II fabriqués par les Ateliers de fac-similés du Périgord à partir des modélisations tridimensionnelles réalisées par Archéovision pour le ministère de la Culture – DRAC Nouvelle-Aquitaine.

Une recherche pluridisciplinaire

Depuis quelques décennies, les travaux dans les grottes ornées associent systématiquement plusieurs disciplines et ne se focalisent plus seulement sur le seul art pariétal. C’est en effet l’ensemble du site, voire son massif, qui doit être étudié pour répondre aux questions telles que : pourquoi ce site a-t-il été choisi ? À quoi ressemblait la grotte lors du passage des populations préhistoriques ? Pourquoi certains secteurs conservent-ils de nombreux vestiges tandis que d’autres en semblent dépourvus ?

Depuis 2009, une vaste équipe a été réunie comprenant les disciplines suivantes :

  • Géologie, karstologie, hydrologie, géomorphologie, sédimentologie
  • Climatologie souterraine
  • Datations 14C en SMA, Ecomicadas, U-Th (TIMS)
  • Études paléoenvironnementales : topographie de précision, paléontologie, spéléothèmes, isotopie
  • Anthropologie biologique, archéothanatologie, paléogénétique, paléogénomique
  • Archéologie des parois ornées : accès aux parois, relevés, étude technologique, éclairage, acoustique
  • Archéologie des traces animales et humaines (TrAcs) : géomorphologie, géoarchéologie, ichnologie, analyses de pigments, archéozoologie
  • Archéologie des vestiges matériels : technologie lithique, osseuse, éclairage, anthracologie
  • Anthropologie culturelle, palethnologie

À ces domaines d’études s’ajoutent des outils communs pour faciliter la recherche :

  • une topographie et une cartographie des sols et des parois de précision ;
  • un relevé 3D du réseau : scan partiellement acquis compte tenu de l’immensité de la cavité : seule la branche aval et deux tronçons de l’amont sont réalisés ;
  • des photogrammétries pour les secteurs à haute valeur patrimoniale et scientifique : panneaux d’art pariétal, bauge d’ours avec des vestiges humains et quelques objets exceptionnels (lame de silex, pointe en bois de renne) ainsi que les empreintes humaines ;
  • une base de données géoréférencées (SIG), ainsi que sa version tridimensionnelle (SIR-3D).

Liens utiles

Projet Collectif de Recherche pluridisciplinaire soutenu et financé par le ministère de la Culture.

PACEA - La grotte de Cussac

En savoir plus

Vidéo d'introduction de Jacques Jaubert (Professeur à l'Université Bordeaux 1) à la journée consacrée à la présentation des travaux autour de la grotte de Cussac :