Habiter l’oasis d’AlUla
Les nombreux vestiges retrouvés dans l’oasis historique d’AlUla la démarquent comme un espace de vie à la fois privé et public. UCOP (AlUla Cultural Oasis Project) enquête aujourd’hui sur ce site remarquable afin d’apporter de nouvelles connaissances sur les modes de vie et l’architecture domestique, dans l’oasis, avant le boom pétrolier de la seconde moitié du XXesiècle.
L’organisation quasi-urbaine de l’oasis historique d’AlUla
L’oasis historique d’AlUla, telle qu’elle était structurée à la fin du XIXe et au début du XXe siècle apr. J.-C., se caractérise par un paysage complexe avec une organisation spatiale proche des règles urbaines. Elle était entourée de murs d’enceinte équipés de tours, dont la fonction était sans doute multiple : assurer la protection de l’oasis d’éventuels assaillants, contrôler les mouvements de population ou encore protéger les jardins du sable et des eaux de ruissellement.
À l’intérieur des enceintes, l’oasis était structurée par deux réseaux :
- un premier réseau de canaux, amenant l’eau des qanats aux parcelles agricoles ;
- et un second réseau de rues, permettant la circulation des personnes et des produits agricoles entre des zones cultivées et la ville.
Les rues donnaient également accès à des partiteurs (distributeurs) d’eau qui étaient des structures publiques permettant d’orienter le cours d’eau vers des zones spécifiques pour les irriguer. Ces deux réseaux, rues et canaux, étaient donc étroitement liés.
Les fermes de l’oasis– un fonctionnement singulier
Alors que dans d’autres oasis arabes les activités étaient souvent spatialement séparées, les espaces dédiés à la vie quotidienne et à l’agriculture s’entremêlent à AlUla. Selon les témoignages, au cours du XXe siècle (et très probablement dès le XIXe) une partie au moins des habitants de la Vieille Ville habitait la palmeraie durant environ cinq mois de l’année, du début de l’été au début de l’automne, afin notamment d’échapper à la chaleur.
Les habitants y logeaient dans des « fermes ». Ces fermes formaient un ensemble de bâtiments construits sur l’emprise d’un jardin horticole et combinaient des fonctions domestiques et agricoles. La plupart des habitations étaient construites à l’avant ou à l’arrière de la ferme, le long des murs en terre crue qui la délimitaient.
Ces ensembles variaient des fermes simples avec seulement une modeste maison (une à trois pièces avec ou sans cour) à des fermes plus élaborées avec une maison complexe (plus de quatre pièces avec cours) associée à un majlis (la salle de réception), une latrine, ainsi qu’un enclos pour les animaux et parfois un bain.
Une partie des activités économiques et domestiques était donc temporairement délocalisée dans la palmeraie, comme l’artisanat ou le commerce de détail. La présence de mosquées à proximité des fermes démontre également une occupation prolongée de la palmeraie, car elles sont des espaces fréquentés quotidiennement pour la prière.
Après les grosses chaleurs et la récolte des dattes en octobre, les habitants revenaient ensuite en ville. On continuait évidemment à cultiver les parcelles pendant le reste de l’année.
L’architecture type des maisons dans l’oasis
L’architecture des maisons présentes dans l’oasis d’AlUla n’a jamais été étudiée ni décrite en détail jusqu’à présent. UCOP vise aujourd’hui à combler cette lacune grâce à des études et à des analyses architecturales détaillées.
Les maisons sont construites à l’aide de matériaux locaux et arborent des éléments architecturaux élaborés. L’étude a dégagé trois matières premières principales : la pierre, la terre et les éléments végétaux. Elles correspondent aux ressources naturelles disponibles localement et permettent de répondre aux contraintes environnementales d’un climat désertique.
Les murs des maisons sont principalement construits en mottes de terre façonnées à la main et moins fréquemment en briques crues moulées ou en pierre. Ces deux dernières sont majoritairement employées dans la construction des cadres de portes et des escaliers. Les fenêtres, les niches et les claustras sont, eux, plutôt construits avec des briques crues moulées.
Nous retrouvons l’utilisation d’éléments végétaux dans la construction des toits plats, réalisés avec du palmier dattier recouvert d’une épaisse couche de terre battue. Les matières végétales sont également utilisées dans la construction d’escaliers, d’étagères, de serrures ou encore pour les battants des portes, constitués de palmier dattier, ou de planches de bois fixées ensemble avec des clous métalliques.
Les maisons sont généralement de deux à trois pièces au rez-de-chaussée, utilisées principalement pour le stockage et/ou la cuisine. Certaines maisons sont équipées d’un escalier menant à une terrasse entourée de parapet, parfois doté de claustras et utilisée, entre autres, pour le couchage. Plus rarement, dans les maisons à l’organisation spatiale plus complexe (quatre à sept pièces au rez-de-chaussée), une pièce fermée était disposée à l’étage en plus des terrasses.
Des complexes agricoles variés
L’étude architecturale menée par UCOP met en évidence le caractère très diversifié des fermes de l’oasis d’AlUla. Cette diversité se reflète dans l’organisation spatiale des fermes mais également dans les techniques de construction, les détails architecturaux et dans les activités qui y prenaient place et matérialisées dans des structures aux fonctions spécifiques.
Une architecture adaptée à l’environnement aride
La pérennité de l’aménagement domestique de l’oasis tient du fait qu’elle répond aux contraintes d’un climat désertique. Cet environnement aride se caractérise par une chaleur excessive et un soleil éblouissant.
Pour surmonter ce climat rigoureux, les habitants d’AlUla ont eu recours à la construction de maisons qui puissent les protéger de telles conditions. Les variations de température sont importantes entre le jour et la nuit. C’est pourquoi des matériaux denses, à forte capacité thermiques sont utilisés pour atténuer les changements de température comme la terre, qui empêche la transmission de la chaleur à l’intérieur pendant les heures d’ensoleillement.
Nous observons également que certaines maisons sont orientées est-ouest, probablement afin de réduire la chaleur diurne et nocturne sur les murs pendant les saisons chaudes, et pour capter le maximum de lumière solaire pendant les saisons plus fraîches. En outre, les parapets et les claustras qui entourent la terrasse assurent non seulement l’intimité des habitants de la maison, mais aussi l’ombre et la circulation de l’air.
Des recherches au service de la préservation culturelle
L’interprétation de ces différents agencements, structures et techniques de construction, soulève encore beaucoup de questions auxquelles le projet UCOP tente de répondre pour approfondir notre connaissance de la vie des communautés locales et pouvoir préserver ce patrimoine culturel de la vallée d’AlUla.
Liens utiles
- Archaïos- UCOP (page de présentation du projet)
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