Explorer le site : Les abris sculptés de la Préhistoire
A l’arrière-train de l’étagne (bouquetin femelle), une tête de bison apparaît en bas-relief. Cette tête appartenait ç un bison de profil gauche dont le corps à été entièrement entamé pour la réalisation de la « bouquetine » de profil droit. Cette reprise offre une superposition inversée de deux espèces animales différentes. L’aspect concave inhabituel du chanfrein du bison ne correspond pas à sa morphologie. Il est donc possible que par la modification du contour du chanfrein, ce profil recherché ait été celui d’un bouquetin.
Ces deux bouquetins mâles sont représenté poitrail contre poitrail. Le bouquetin de gauche tourne la tête vers l’arrière, il a les pattes raides et la queue relevée. Celui de droite a un corps plus allongé et en mouvement. Son traitement est original du fait de l’utilisation de reliefs inversés avec l’emploi de creux pour figurer des volumes. Ces deux bouquetins étroitement associés suggèrent une scène d’affrontement.
La « bouquetine » ou étagne est la silhouette animalière la plus en relief avec son poitrail dégagé sur une épaisseur de 20cm. Une importante zone de calcaire a été dégagé autour des pattes. Ce dégagement illustre la technique sculpturale adoptée au Roc-aux-Sorciers. Tournée vers l’observateur de façon peu réaliste, l’avant-train permet de voir l’attache des deux pattes antéireures. L’arrière-train a lui aussi été déformé pour rendre visible le sexe ouvert. Juste devant, un jeune bouquetin est figuré sans corne ni barbichette. Le relief, déjà peu accentué au niveau de la tête s’atténue jusqu’à la croupe, qui n’est pas plus figurée que par un trait de gravure. Cette image permet de comprendre l’un des procédés de réalisation, à savoir d’abord gravure du contour de la silhouette, puis raclage pour dégager les volumes.
En arrière-plan, au niveau du jeune bouquetin, on remarque plusieurs vestiges de figures : la ligne d’un arrière-train de bison, la tête d’un animal et les jambes d’une femme. Ces superpositions de figures sont riches d’information, tant sur le plan technique gravure/sculpture) que thématique (la succession des techniques des représentations femme/bison puis bouquetin). Elles traduisent des reprises successives par des artistes magdaléniens et nous renseignent sur la chronologie du décor pariétal au cour de l’occupation magdalénienne. Ces retailles sont l’occasion d’analyser les réappropriations de la paroi par les occupants successifs.
Les bouquetins s’organisent selon deux registres iconographiques horizontaux. Les mâles s’alignent sur le registre supérieur tandis que la « bouquetine » et un petit occupent le registre inférieur. Cette distribution révèle une volonté d’organiser les figures pariétales selon des compositons structurées qui font sens, où chaque sujet a sa place déterminée. Il n’existe aucun espace libre entre les figures, elles sont juxtaposées de façon rationnelle. Sexe, âge, et attitude renforcent le rôle tenu par chacun. Cette restitution fait écho à la sociale des bouquetins, probablement la fin de l’automne quand les hardes (mâles et femelles) se rassemblent au début de la période de rut.
Les retailles successives laissent des traces indéniables sur la paroi. Ici la ligne de dégagement du bouquetin ne correspond pas à la morphologie naturelle de son dos. La bosse indiquerait plutôt celle d’un bison. Par ailleurs sous certains éclairages, d’autres formes apparaissent. Elles laissent deviner les vestiges qui indiqueraient la présence d’un cheval. Nous avons donc sur cet animal ; la trace de retailles successives (cheval, bison, bouquetin). L’analyse de cette superposition à l’aide des relevés des figures (bison et cheval) illustrent ces retailles successives.
Un félin de profil droit, gravé à l'aide d'une incision large et profonde, se discerne nettement dans un autre secteur. Quelques détails suffisent à lui donner de la présence : gueule ouverte, oeil gravé, oreille ronde, vibrisses, pattes antérieurs schématisées et rectilignes. Situé à proximité d'un troupeau de chevaux, mais lui tournant le dos, on peut se demander s'il participe à une mise en scène.
La qualité graphique de la sculpture de ce bouquetin mâle exprime toute la maîtrise technique des artistes. La tête, très bien conservée, laisse voir des détails anatomiques très précis, comme le coin de l'oeil appelé caroncule lacrymale, la langue tirée, et les cercles de croissance sur les cornes. Le tracé de l'oeil est très fin et maîtrisé.