Les recherches semblent montrer que le bitume fut peu utilisé à l’âge du Bronze dans la région de la Syrie côtière, et ce, malgré l’existence de ressources locales, dont l’exploitation pourrait remonter au Chalcolithique, comme semblent l’indiquer des analyses de bitumes provenant de Hacinebi en Turquie méridionale (vers 4000 av. J.-C.).

À Ougarit, l’emploi abondant de la pierre pour la construction des édifices et pour les aménagements hydrauliques explique en partie cette situation. Par ailleurs, dans le domaine mobilier, il est possible qu’en raison des conditions de conservation offertes par le sous-sol et des très faibles quantités de matériau mises en œuvre, le matériau ait disparu au cours du temps.

La documentation archéologique de Ras Shamra offre deux types d’attestations. Le premier fait référence au bitume identifié avec certitude, grâce à des analyses en laboratoire. Les résultats de ces études ont montré l’emploi, dans la cité du Bronze récent, de bitume de provenance locale, et ce dans différents domaines : l’architecture (attestation exceptionnelle sur les orthostates du Palais Nord), l’outillage lithique (fixation des lames de silex des faucilles dont le manche était en bois) et la statuaire. Pour le mobilier, ce sont, avant tout, les qualités adhésives du matériau qui ont été recherchées.

Pour le second type, l’emploi du bitume est suggéré sur la base d’une reconnaissance à l’œil nu. Les occurrences concernent, cette fois-ci, les domaines de la parure et de la céramique, le matériau ayant été employé pour ses qualités adhésives, plastiques, ou encore d’imperméabilité.

Une sélection d’échantillons de Ras Shamra a été étudiée au Laboratoire de Biogéochimie Moléculaire (CNRS – Université de Strasbourg) par Jacques Connan, spécialiste des bitumes archéologiques, et son équipe. L’analyse par chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse des hydrocarbures saturés de ces échantillons montre qu’ils sont principalement constitués de bitume altéré. L’analogie de la composition isotopique du carbone ainsi que des profils moléculaires de ces bitumes avec ceux d’asphaltes naturels provenant du gisement de Kfarié, situé à proximité du site de Ras Shamra (à une trentaine de km au nord-ouest), a permis d’établir que ce gisement était à l’origine des échantillons de bitumes étudiés.

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