Les dieux romains

Si les traces architecturales des temples d’époque romaine restent hypothétiques, les inscriptions, les monnaies et la statuaire peuvent être des témoins sur les cultes à l’époque romaine. Zeus, le plus grand dieu du panthéon des Grecs, et son pendant romain Jupiter, occupent une place dominante à Bosra. Zeus Kyrios (tout-puissant) et Héra, son épouse, étaient honorés à Bosra comme des dieux ancestraux, d’après la dédicace d’un militaire sur un autel. Sur un autre autel, Zeus est qualifié d’Epikarpios, «celui qui produit des fruits».

Le dieu tout-puissant des Grecs était également honoré sous la forme du «Dieu de Damas» (Zeus Damaskênos), forme gréco-romaine probable du grand dieu Hadad de Damas. Sous le nom du Jupiter romain, le grand dieu ancestral d'Heliopolis-Baalbek apparaît à Bosra, sans doute vénéré par des soldats. Un autre Zeus dit «du Safa» (Saphathênos) est encore mentionné sur un autel.

Le plus présent à Bosra est Zeus ou Jupiter Ammon, le dieu de Siwa en Égypte de l’Ouest, qui était le dieu des soldats de la légion III Cyrenaica, installée en garnison à Bosra à partir du IIe siècle apr. J.-C. Souvent représenté sur les monnaies de Bosra, Zeus Ammon apparaît sous divers aspects. Sur certaines monnaies de Bosra, le dieu de la légion est représenté auprès de la Tychè poliade, la déesse protectrice de la ville, comme pour associer officiellement la garnison au site et à ses habitants.

Tychè occupe également une place importante dans le panthéon de Bosra. Elle est souvent représentée sur le monnayage, généralement seule, et ses traits rappellent ceux de la Tychè-Astarté, la grande déesse de Phénicie. Sur des monnaies du IIe siècle, elle est représentée sous les traits d’Athéna casquée, la déesse armée grecque de la raison et de l’intelligence, qui est aussi protectrice de la ville d’Athènes. Athéna est dans la région la forme gréco-romaine de la grande déesse arabe Allât, déesse tutélaire de Bosra.

Dédicaces et statues

Dans une dédicace, un dieu bien romain apparaît aussi à Bosra : Mercure, protecteur des voyageurs et des commerçants, invoqué par les habitants de Thysdrus (el-Djem en Tunisie), ce qui atteste sans doute la présence à Bosra de commerçants de cette provenance.

Toujours d’après une dédicace, la déesse Hygie, personnification de la santé, considérée comme une des filles d’Asclèpios, dieu de la médecine, avait, semble-t-il, un sanctuaire à Bosra.

La statuaire enrichit aussi notre connaissance du panthéon d’époque gréco-romaine à Bosra. En plus du Zeus Ammon de Cyrénaïque, une statue de Sérapis, dieu égyptien d’époque hellénistique de la mort, de la guérison et de la fertilité, confirme l’importance des cultes importés par la légion III Cyrenaica, de même qu’une statuette d’Harpocrate, le dieu enfant égyptien. Sérapis est d’ailleurs représenté sur une monnaie de Bosra de l’époque de Commode (180-192). D’après des fragments, on peut restituer aussi une statue représentant Apollon ainsi qu’une des Muses, qui peuvent avoir décoré un grand édifice public.

À côté de ces cultes d’origine ou d’apparence gréco-romaine, il faut mentionner des lieux de culte plus clairement politiques et largement répandus dans l’Empire romain, comme la présence vraisemblable d’un temple dédié à la déesse Roma et au divin Auguste dans le quartier de l’Est, d’après le fragment d’inscription, rehaussé de rouge, conservé sur un bloc d’architrave. Ou bien encore les monuments dédiés au culte impérial.